Chine-Chine 1980

La Chine ! Après les Baléares, Djerba, les Seychelles, l’île de Pâques et Acapulco, la Chine est en passe de devenir un des principaux buts du tourisme mondial. Il est désormais (presque) aussi simple de se rendre à Canton qu’au Mont-Saint-Michel. Que de changements en quelques années, en quelques mois ! Et ces Chinois qui accueillent les premiers touristes occidentaux comme s’ils n’avaient fait que cela de toute leur vie!

Mon premier étonnement chi­nois se situe, bizarrement, à Berlin-Ouest. J’y étais des­cendu, voilà quelques semai­nes, dans le même hôtel que les artistes de l’Opéra de Pé­kin. Qui, soit dit en passant, préféraient se produire pour les nantis de l’Ouest que pour les ca­marades de l’Est. Dans l’après-midi, je me suis trouvé devant l’hôtel au moment où toute la troupe, sur le trottoir, attendait l’autobus qui les emmènerait à la répétition.

Chanteurs, danseurs, musi­ciens, tous arboraient des te­nues occidentales ostensible­ment négligées et la plupart portaient en bandoulière des sacs de sport publicitaires. Un seul des membres du groupe était vêtu de la stricte tenue Mao, grise et austère. Trop vieux pour danser, trop fluet pour chanter, trop buté pour sourire. Camarade-commis­saire-politique, sans doute.

L’homme voulut faire une re­marque à un danseur. Un geste méprisant, pour toute réponse, lui fut un premier camouflet. Et, lorsque le commissaire revint à la charge, le danseur lui tourna le dos, tout simplement. Avec dédain et majesté. La Bande des Quatre ne faisait plus peur.

Macao, un vendredi matin. La navette rapide vient de m’ame­ner de Hong-Kong, en moins d’une heure. Je monte dans l’autobus équipé  de deux jeux de plaques d’immatriculation, l’un de l’enclave portugaise, l’autre de Chine. Sont déjà installés, appareil photographique sur le ventre, une bonne quinzaine d’Américains, une Française, deux Espagnols et quatre Asiatiques portant riche, sans doute des Chinois établis quelque part en Asie du Sud-Est. Tous touristes.

Rideau de fer, connais pas. Les formalités de douane sont légères, les fonctionnaires sou­riants et débonnaires. Ni barbe­lés, ni miradors. Mais une tasse de thé offerte à chacun, tandis que le chauffeur remplit un for­mulaire pour l’autobus et qu’une famille américaine se fait photographier sous le por­trait de Mao.

La Chine s’ouvre au tourisme mais rien n’est encore prêt. Les routes sont cahotantes et poussiéreuses, les nouveaux hôtels sont à l’état de chantiers et les Américains font la gri­mace dans le restaurant rudimentaire et vieillot de Shiqi. Qu’ils se rassurent: une société de Hongkong vient de vendre cinq cents jeux de ping-pong électronique aux Chinois. Et il y a belle lurette que le Coca fait concurrence au vin de riz sur les tables d’hôtes.

En 1972, j’avais failli voir la Chine. J’avais même obtenu un visa,
qui m’avait ensuite été retiré sans explication. Aujourd’hui, pour les excursions brèves, on entre sans visa. Il suffit de se présenter, avec trois jours d’avance, au China Travel Ser­vice de Hong-Kong, de payer le prix (raisonnable) du voyage et de se trouver au rendez-vous le jour dit.

Quel regret de ne pas parler chinois ! Car le contact est fa­cile et rien, à la différence de l’Union soviétique, ne semble s’opposer à une conversation anodine. N’était la langue. Il faudra que je l’apprenne, sinon ma concierge me racon­tera la Chine avant que j’aie eu l’occasion de la comprendre.

Alex Décotte présente chaque jour, du lundi au vendredi, dans «Top matin» (RSR 1 à 6 h. 40) un instantané sonore de son pé­riple autour de la planète. En marge de ces interventions à l’antenne, il nous livre en exclu­sivité quelques pages de son carnet de route.

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