Provence

Provence docu

Première excursion en terre provençale  Je devais avoir huit ans et sans doute n’appréciai-je pas à sa juste valeur. Ne me reviennent en mémoire que la touffeur du voyage, la peur dans les tunnels, la méchante odeur charbonneuse de la locomotive. Puis la maison amie, dominant la mer. Le jujubier aux fruits aigres, le réservoir d’eau potable, qui nous servait de piscine et dans lequel je prenais un malin plaisir à pisser à grands jets moussus. Les batailles de mantes religieuses aussi, auxquelles nous assistions avec délectation, enfermant les protagonistes sous une cloche de verre, afin que ne nous échappe aucun des détails du meurtrier festin.

Souvenirs d’eau enfin. Noyade à laquelle je n’échappai que d’extrême justesse, jeté et rejeté par la vague, à en perdre souffle et cuir, sur les dents acérées d’une calanque. Puis ce fut le retour et, preuve que ce coin d’univers m’avait peu marqué, je ne crois pas avoir conté le moindre épisode provençal à mes camarades au parler pointu, lorsque revint le temps de l’école et des brumes du nord.

Je n’avais remarqué ni l’exubérance, ni les couleurs, ni les odeurs, ni le verbe, ni l’effort, ni la sagesse, ni la malice. Bref, à la manière de Monsieur Jourdain, j’avais fait du tourisme sans le savoir. A huit ans, j’avais quelques excuses.