Deux dates marquaient l’année de mon papa: le 22 mars, jour de son anniversaire (il était né en 1910) et le 22 septembre, jour de la saint Maurice. Il y avait beaucoup de Maurice en ce temps-là à Ferney, à commencer par Maurice Traffey, le patron du Café du Soleil, et c’était l’occasion de banquets mémorables.
Que sais-je finalement de mon papa, sinon que je ne l’ai pas assez connu et sans doute pas assez compris. Son prénom d’emprunt, Maurice, alors qu’il se prénommait Aimé. Son enfance ferneysienne. Sa rencontre avec ma maman, du bout des lèvres. Leur voyage au Brésil, en pleine guerre. Ma naissance juste après leur retour. Et la fracture grandissante de leur couple.
J’avais plus de chances de trouver mon papa au Café du Soleil, devant un tapis de cartes et une picholette de blanc, qu’à la maison où il rentrait tard et ne rencontrait presque jamais plus ma maman.
Il avait été élu conseiller municipal, puis adjoint. A ce titre, il présidait les mariages, offrant aux jeunes mariés, sur ses propres deniers, un gros livre de cuisine en prévision des retours d’affection.
Notre maison, aujourd’hui englobée dans un univers d’immeubles, se trouvait encore un peu à l’écart du « vieux » Ferney. Nous avons fini par déménager dans une villa proche. C’est là que je l’ai vu vivant pour la dernière fois.
J’ai appris beaucoup de lui, à commencer par la passion de la langue française, mais j’en ignorerai bien davantage, pour toujours.
Mon cher Alex quelle brillante idée, et quel dommage que maman n’est pas su qu’il s’appelait Aimé car elle aussi était une Aimée, il y avait également Aimé Blanc de la Truite.
Magnifiques photos, une grande partie de mon enfance. En tant qu’enfant je pense que chacun peut se faire la même réflexion que toi sur son père. Nous devions nous taire à table, il travaillait puis le samedi trop fatigué il allait faire la sieste.
Je me souviens très bien de sa VW bleu ciel et entre nous nous disions qu’il ne changeait jamais de vitesse..
Mon épouse et moi-même conservons un émouvant souvenir de ton papa. Lors de notre mariage en 1968, il nous remis son fameux livre de cuisine, (toujours en service) avec la recommandation suivante adressée à mon épouse : « lorsque vous aurez mis au point quelques recettes, je serai ravi de partager votre table ! » Ce qui fut fait. Ce soir là nous avons vécu un moment inoubliable !